vendredi 3 août 2007

Extrait du journal de bord : ARUTAM (esprit de la foret)

Dimanche 22 juillet :

Réveil difficile a 10h30, mais il faut faire son sac et libérer la chambre a 12h00! A 15h00, nous finissons par prendre un bus, direction Shell. Nous arrivons 1h30 plus tard sous la pluie et l'orage où nous retrouvons notre guide, Didier, en volontariat depuis 10 mois chez les Shiwiars. Antoine ( la 4eme personne du groupe) n'est toujours pas là ! Vers 21h30, Didier passe à l'hotel et nous annonce qu'il l'a retrouvé, dans un autre hotel de Shell. Il est arrivé a 13h00... en taxi de Quito! Nous apprendrons plus tard qu'il etait sous l'effet du Lariam, l'anti-palu le plus redoutable, amnésie assurée!!!

Lundi 23 juillet :

Nous retrouvons Didier et Antoine à 8h30: ça y est, c'est le grand jour, le grand saut, nous partons en Amazonie dans les communautés Zapara et Shiwiar pour 10 jours de partage et de riches experiences.

Mais décidément, l'amazonie, ça se mérite! A notre arrivée à "l'aéroport" de Shell, nous apprenons que : la compagnie prévue ne vole pas aujourd'hui, et que le président de la collectivité zapara a envoyé un papier signé, interdisant notre entrée dans le territoire. Oups ! pourtant, on est pas des méchants ! Que passate ? ( comme dirait Jérome!). Nous apprenons entre temps que les querelles indigènes aussi ont fenètre sur cours! Heureusement, Bolivar, en gros le président de la communauté de commune, nous permettra de partir après avoir passé quelques coups de téléphone. Nous finirons donc, après avoir changé de compagnie et acheté de belles botines en caoutchouc, par nous envoler vers 12h00 a bord d'un Cessna, un bouiboui de 5 places. Sensations garenties!!! Nous survolerons une immensité verte pendant 1h15 avant d' attérir au milieu des arbres, sur une petite piste aménagée au milieu du village de Wiririma.(...)







Accueil timide, mais chaleureux de la communauté de Wiririma. Les enfants nous regardent, l'air intrigué, et tous ont le sourire aux lèvres.




Didier nous apprendra plus tard que ce n'est que la troisième fois qu' ils recoivent un groupe de "touristes". Environ une cinquantaine de personnes vivent ici, dans de belles cases en bois montées sur pilotis.


La maison communautaire, nous y passerons 2 nuits.

Nous nous présentons á l'assemblée, de plus en plus importante, et Hannibal, le chef du village fera de même, en nous souhaitant la bienvenue. Chacun à son tour se presentera : Gallo, Leonidas, Carlos, Noémie, Segundo ( le professeur), Béatrice ( la femme d'Hannibal), Valerio, Bertrand...

Béatrice nous préparera d'ailleurs un bon déjeuner à base de Yuca et d'un bon poulet fraichement plumé pour l'occasion.(...)




Notre premier repas... Un invité de dernière minute se joindra à nous!

Plus tard dans l'aprés-midi, Jérome se lancera dans le rasage de la maigre barbe d'Hannibal : cela fera rire tout le monde, ce qui ne facilitera pas le travail de notre apprenti barbier.(...)




Explication de notre totem babylonien!

Au coucher du soleil, nous partons en pirogue chez Léonidas qui nous a invité à boire la chicha, "la boisson" locale faite à base de yuca ( manioque ) fermenté ! Comment dire... vraiment spéciale, très acide mais pas mauvais! Heureusement car ici, la chicha c 'est comme le thé à la menthe au Maroc, c'est difficile de refuser et ça facilite l'intégration. Elle se boit dans un bol, appelé Pinchi, une énorme graine qu'ils vident à la cuillère avant de la cuire et de la sécher au soleil. La mère de Leonidas m'en fera boire deux bols cul sec, et en insistant bien !!! (...)


"Et glou et glou et glou...Il est des nôtres, il a bu la chicha comme les autres..."

Oh, j 'oubliais un détail très important!!! A notre arrivée chez Léonidas, en sortant de la pirogue, quelqu'un nous attendait... Un des serpents les plus dangereux de la région ! Sa particularité ? Plutôt vindicatif et mortel. Hannibal lui fera la peau, un comble pour un serpent! (...)



Enfin voilà, une première journée chargée en émotion et en découverte, qui laisse présager 10 jours intenses, riches en experience !

Mardi 24 juillet :

Nous nous réveillons tranquillement avec le soleil. Trés agréable notre première nuit à Wiririma! Les lucioles se promènent, les grillons chantent accompagnés par les grenouilles...



Vers 7h00 ( enfin je crois! On perd la notion du temps ici ! ), Hannibal nous emmène en pirogue au Saladero, tout proche de la communauté, où les perroquets viennent se restaurer en sel.
Tonio et Hannibal

Nous les observerons tout un moment dans les arbres, mais ce coup-ci, ils ne descendront pas, je crois que l'on a été repéré !




Le perroquet de Valerio, plus facile à prendre en photo !


Retour à la casa pour un bon petit dej´à base de poisson frais ( wantchitchi, kapawi...), yuca et jus de plantin puis visite de l'école ! Je discuterai encore un long moment avec Segundo, passionné par son travail, très interessant et très curieux, qui finira même par me demander quelle est la différence entre le socialisme et le communisme...! (...)


Elle est gentille la nouvelle maitresse et jolie en plus !

Nous partons ensuite faire un tour dans la communauté, visiter les maisons de chacun. (...) Nous prenons un autre sentier pour nous rendre chez Gallo. Ouf, il est là ! Il nous montre ses ruches ( projet monté il ya a 4 mois par Didier dont il est très fier !). (...)


Petites abeilles inoffensives. Leur miel est divin!

Les enfants rentrent de l 'école, nouvelle séance photo, ils adorent ! Et la petite regarde tout un moment mes cheveux ainsi que les poils de bras de Jérome, très drôle !




La maison de Gallo


Puis, Gallo, pour notre plus grand plaisir, nous fabrique à chacun une flêche, pour essayer la sarbacanne! Le doudou Geronimo fera mouche 3 fois !



Il est 13h00 et grand temps de rendre visite au chaman pour assister à la préparation de l'ayahuaska. Au programme de ce soir : expérience chamanique! (...)


La casa de Fernando, le chaman de la communauté

Nous rentrons déjeuner, Béatrice nous attend pour un grand repas de fête : des vers de palmiers... ca passe plutôt bien. De gros vers blancs comme votre pouce, c'est plein de vitamines !


Comme on dit : bonne chance !


Allez savoir lequel des deux mangera l'autre !

Fin d' aprés-midi tranquille pour les hommes, tandis que j'attaque la préparation de la chicha ( reservé aux femmes !) avec Béatrice. Cela demande des bras et une bonne résistance, car travailler avec une chaleur ambiante, de plus près d'un feu, ça donne chaud !(...)


Mercredi 25 juillet :


Nous partons pour 2 jours de marche en pleine jungle !

Hannibal, Gallo, Raoul, Valério et un de ses 10 enfants, Léonidas (notre cuisto) et Bertrand nous accompagnent dans ce périple. Hannibal et Gallo restent avec nous, tandis que les autres partent devant préparer le campement ! (...) En chemin, nous découvrirons pleins d 'arbres, des plantes, notamment des lianes remplies d'eau fraiche avec un p'tit gout de végétal...



De l'eau...

Et des vers... pour les braves !

Nous nous prendrons les pieds dans les branches, les racines, traverserons des marécages, esquivant les arbres à épines et les fourmis carnivores ... Si ça c'est pas de l'aventure!



Fabrication d'un sac végétale en feuille de palmiers de la marque "Leonidas".

A notre arrivée, nous admirons le campement, superbe... Quelques morceaux de bois, des feuilles de palmiers, et nous avons notre abris pour la nuit! (...)




Jeudi 26 juillet:

Réveil a 6h, petit dej' à base de lentilles et de riz sous une bonne averse... cette fois ci, nous partons en groupe, histoire d'avoir plus de chance d'observer les animaux. Nous serons servis! Les arbres s'agitent au loin... les singes arrivent! Bertrand, avec une agilité déconcertante se mettra à parler singe. Dans la matinée, nous aurons l'occasion de rencontrer 4 familles différentes : les Maquisapa, les Chorongo (ils sont roux et se mangent), les Colorado et les Chichico (tout petits). Viendront se mèler à tout ça, un pivert, 2 toucans, une grenouille et des insectes divers (...)






A partir de midi, grosse averse et pluies qui alterneront sans nous lâcher jusqu'à notre arrivée. En plus de se prendre les pieds dans les racines, on patauge dans la gadoue... crevant de marcher en Amazonie! Nous arrivons lessivés dans la communauté de Juyuintsa, en pleine effervescence. En temps normal, seules trois familles vivent ici, mais en ce moment, il y a une formation sur la santé (palu) et également deux journalistes francaises, Christine et Dominique, sur le terrain depuis 15 jours pour faire un reportage sur la légalisation des terres Shiwiar.

Christine, journaliste de mode à ses heures perdues... Collection shiwiar automne-hiver!


Nous passerons la soirée en leur compagnie, elles vont nous suivre jusqu'à la fin de notre séjour! A partir de maintenant, Daniel sera notre nouveau guide, Hannibal et le reste de la troupe retournent à Wiririma demain. En attendant, la nuit reste d'être longue... la chicha tourne!

Vendredi 27 juillet :

La nuit s'est bien passée, même si la rencontre de la veille au soir ne nous avait pas tellement rassuré. Une grosse bébette que l'on appelle mygale voulait partager les lieux ! (...)


Mimi, l'araignée... Qui s'y frotte, s'y pique!

Aujourd'hui, nous partons en pirogue, 5h environ, jusqu'à la communauté de Tanguntsa où habite Daniel (...) Comme à la coutumée, les communications radio étant très aléatoires, personne ne nous attendait. Ici, on a beau prévenir plusieurs fois de notre arrivée, si il n'y a pas de confirmation le jour même, ils se disent que nous n'allons pas venir! Nous sommes affamés... Julia, la femme de Daniel nous prépare un bon repas pendant que nous faisons connaissance avec toute la communauté, crée il y a environ 8 ans dans le but de s'ouvrir au tourisme. Ils n'ont en réalité recu que quelques groupes, mais les installations sont là . Nous avons chacun le droit a notre petite cabane fermée avec... un matelas! J'avoue, très appréciable! Ah les Européens et leur petit confort!




Super Geronimo

Samedi 28 juillet :


Nous nous levons tranquillement. Les enfants gambadent déjà, le sourire aux lèvres, beaux comme tout dans leurs tee- shirt trop grands (...)






Ce matin, ce sera visite de la Chacra, le jardin. Nous y retrouverons Julia (travail réservé à la femme) en train de récolter des papas nativas. Nous la suivrons tout le long, en compagnie de Daniel qui nous expliquera un peu le système de culture et les différentes variétés (...)


La Naranjilla, un fruit au goût de tomate et poivron !

En fin d'après midi, nous retrouvons Victor et Gonzalo pour un petit cours de botanique, direction le jardin médicinale (...)



La nuit tombe sur Tanguntsa, le cours est terminé, nous reprendrons demain. En attendant, soirée documentaire... même au fin fond de l'Amazonie, on trouve la télé et le DVD! Dominique et Christine nous montre leur reportage sur les Ayoreo, une communauté indigène du Paraguay qui n'a hélàs pas la chance, comme les Shiwiar, d'avoir un Etat qui accepte la légalisation des terres. Oppressés par les buldosers qui détruisent la forêt, ils se retrouvent obligés de s'installer près des villes, abandonnant leur vie nomade en se confrontant à la dure loi de la civilisation. Tout le monde regarde ça avec intention, des plus jeunes aux plus agés. Mais sont-ils vraiment conscients de l'enjeu de la légalisation des terres indigènes ? Se rendent-ils compte qu'ils vivent au coeur du poumon de la Terre ? Les Shuars, voisins, ont récupéré une partie de leur territoire. Depuis, ils vendent leurs propres arbres aux Etats-Unis qui viennent charger directement, par avion, cette forêt primaire si précieuse pour l'humanité... Ici aussi l'argent est devenu une nécessité. Le tourisme peut être un moyen de protéger la forêt, mais il peut aussi faire des ravages. Il est important de le controler, mais jusqu'à quand ? (...)


Dimanche 29 juillet :

Comme promis, la visite botanique continue. Mais avant cela, petite séance de maquillage proposée par Victor que nous regardons faire avec attention. Me voici transformée en serpent, tandis que Jerome prend la forme d'un anaconda!



Victor nous emmène ensuite en forêt pour nous montrer quelques plantes et arbres de la région : l'algodon (arbre a coton), le leche, l'Aji, le chpingo (arbre a canelle), le wambaca (l'arbre a savon), le kourikouri ( langue de belle mere!!!), l'oukcha, le tsaï, le watcha, le yumi kangap...

Le watcha, il change d'écorce tous les mois et son tronc, froid, permet de se raffaraichir au coeur de cette foret chaude et humide!


A notre retour au village, Julia et Rosa nous attendent pour un cours de céramique. Décidément, une journée riche en enseignement. Nous allons tout d'abord récupérer la terre argileuse dans un trou d'eau non loin. Puis nous revenons nous installer dans une petite casa ou les filles nous expliquent les différentes étapes pour fabriquer des Moukawas, un bol qui sert a boire la chicha! (...)






La journée artisanat n'est pas finie! En fin d'apres-midi, toute la communauté nous présente ses productions, dans le but de les vendre évidemment. Comment ne pas craquer sur les toupies en graine de coco de Gonzalo, ses colliers en graine de Katipiwa, de cumbia, d'os d'anaconda, les bracelets de Julia et ses sacs en fibre naturelle, ou encore les belles céramiques de Rosa! (...)


Lundi 30 juillet :

Aujourd'hui, nous repartons en pirogue à Juyuintsa en compagnie de Daniel, Julia, leurs 4 enfants et de Serembo qui nous avait accompagné jusqu'a Tanguntsa. Il va pouvoir retrouver ses 3 femmes et ses je ne sais combien d'enfants! La pratique de la polygamie est encore présente dans ces communautés mais ne fait pas la majorité (...) Quant au mariage officiel, il n'existe pas. Sur leurs cartes d'identités, ils sont toujours célibataires, et les enfants prennent le nom du père et de la mère. Lorsqu'un couple se forme, l'homme ou un intermédiaire, fait la demande aux parents. Une petite fête est alors organisée et il est également fréquent que l'époux construise une nouvelle maison á son beau père.

Au bout de deux heures de pirogue, nous nous arrêtons chez une famille Zapara pour le coup totalement coupée du monde. Personne ne parle espagnol, les enfants ne vont pas à l'école, et la chicha n'est pas gardée dans une poubelle en plastique mais dans une grosse céramique comme auparavant (...)







Nous continuons notre chemin jusqu'à une petite plage où nous nous étions arrêtés à l'aller pour une pause déjeuner (...) Vers 16h , nous repartons (...) Nous aurons la chance de croiser 2 Kapibara (sorte de gros ragondins), des tortues, des toucans, ainsi qu'un bout de dauphin qui ne voudra pas se montrer plus que ça!




Mardi 31 juillet :

Dernière journée complète à Juyuintsa. Les hommes ont décidé de faire la fête, la chicha coule a flot dès le matin, servie par les femmes qui prennent un certain plaisir à bourrer leurs maris ! C'est d'ailleurs la seule forme de pouvoir que les femmes ont , au coeur de cette société plutôt machiste! (...) La fin de journée se poursuit au rythme de la chicha, les parties d'Ecuavolei et de foot indoor s'enchainent.








Mercredi 1er aout :

Nous nous réveillons sous un beau ciel bleu, Daniel, encore sous l'effet de la chicha s'est remis à la guitarre. Nous plions notre moustiquaire, rangeons nos affaires (...)


L'avion arrive, il est temps de partir, des images pleins les yeux et dejà l'envie de revenir. Une heure et quart de vol au dessus de la jungle à suivre le fleuve sinueux d'où émerge, de-ci de-là, quelques communautées isolées. Puis, peu a peu, la route apparait, les toits en feuilles de palmiers laissent place aux tôles rouillées, les industries de scierie s'installent et l'on peut observer des zones entièrement déforestées... l'emprise de l'homme sur la nature (...)